Farce macabre chez les tontons macoutes
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Popa Singer de René Depestre
(Editions Zulma, février 2016, 153 pages)
Nous le savions que les tontons macoutes ne faisaient pas dans la lingerie fine mais nous ne l’imaginions pas ainsi. Avec Popa Singer, Depestre nous dépeint un monde, un pays, où la folie furieuse s’envoie en l’air pour un oui pour un non et à tous les coins de rues. Nous sommes en 1958 et Doc Duvalier règne en Ubu flingueur, sorte de tarasque ridiculement monstrueuse, d’immonde avatar vaudou pratiquant la zombification à l’échelle d’un peuple.
Un mot de travers, une pensée non orthodoxe et vous voilà aussitôt percé comme tamis au fusil mitrailleur, étêté à la machette, émasculé à la tenaille de forgeron. Ça ne traîne pas et être dans l’opposition n’est pas une sinécure parlementaire mais une épouvante quotidienne.
C’est toute l’histoire de ce livre. Autour de la mère (Popa Singer), initiée au vaudou, toute une famille essaye à sa façon de résister à la dictature et ses brigades de la mort. Depestre traite cela comme une farce macabre avec une verve généreuse et colorée mâtinée de surréalisme qui n’appartient qu’à lui.
La fiction ici s’approche au plus prêt de l’Histoire d’Haïti. Un exotisme glaçant.
Michel Gorsse
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De Jacmel à Lézignan-Corbières
René Depestre est né à Jacmel sur la côte sud d’Haïti le 29 août 1926.
Étudiant, il participe au mouvement révolutionnaire de 1946 qui aboutit au renversement du gouvernement d’Élie Lescot mais la prise du pouvoir par les militaires le contraint à partir en exil en France. Il poursuit des études de lettres et de sciences politiques à la Sorbonne. À Paris, il fréquente les poètes surréalistes français et des artistes étrangers, ainsi que certains intellectuels du mouvement de la négritude. Très lié aux mouvements révolutionnaires de la décolonisation, René Depestre voyage dans le monde entier: Union soviétique, Chine, Brésil, Argentine, Chili et surtout Cuba, en 1959, à l'invitation de Che Guevara. Écarté par le pouvoir castriste dès 1971, Depestre rompt avec l'expérience cubaine en 1978 et retourne à Paris où il travaille au Secrétariat de l'Unesco jusqu'en 1986.
(Eléments biographiques puisés en partie dans la documentation de l’Ecole normale supérieure).
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Depuis 27 ans l’écrivain caribéen vit à Lézignan-Corbière, dans sa « Villa Hadriana » qu’il s’est offert grâce aux royalties de son roman Hadriana dans tous mes rêves, couronné en 1988 par le prix Renaudot.
Il a publié notamment : Le Mât de Cocagne, roman, Gallimard, 1979; Folio, 1998 ; Bonjour et adieu à la négritude, essai, Laffont, 1980; 1989 ; Alléluia pour une femme-jardin, récits, Gallimard, 1981; Folio, 1986, 1990 ; Éros dans un train chinois, nouvelles, Gallimard, 1990; Folio, 1993. En avril 2007, il est le lauréat du prix Robert Ganzo de poésie pour son livre La rage de vivre édité aux éditions Seghers.
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"Popa Singer" : René Depestre règle ses comptes avec Duvalier en mode burlesque
Depuis " Hadriana dans tout mes rêves ", prix Renaudot en 1988, l'écrivain haïtien René Depestre n'avait pas publié de roman mais des essais ou de la poésie. A près de 90 ans, il publie chez...
Un interview de René Depestre dans sa villa Hadriana à Lézignan-Corbières.