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Publié par Bernard Revel

Didier Goupil (photo Café littéraire d'Escalquens)
Didier Goupil (photo Café littéraire d'Escalquens)

« Traverser la Seine » de Didier Goupil

Éditions Le Serpent à Plumes, 143 pages, 17 euros

Né en 1963 à Paris, Didier Goupil a vécu à Perpignan avant d’aller s’installer à Toulouse. Auteur de nouvelles (« Absent pour le moment », éditions Trabucaire 1997) et d'une dizaine de romans dont « Le jour de mon retour sur terre », 2003 et « Journal d’un caméléon », 2015, Didier Goupil recevra le prix Jean Morer des Vendanges littéraires, le 2 octobre à Rivesaltes.

Madame est morte, elle en savait trop

Madame traverse ses derniers jours. Ce personnage que Didier Goupil décrit avec tendresse, détachement et un brin d’ironie, nous l’avons déjà rencontré dans un de ses premiers livres. La solitude, le Ritz, la déportation, les chiffres tatoués sur l’avant-bras, Peggy, l’amie américaine grande collectionneuse de peinture moderne, bien d’autres détails encore, font de « Traverser la Seine » une édition augmentée de « Femme du monde » paru en 2001. Didier Goupil n’en avait pas fini avec elle. Tel un peintre qui n’arrive pas à mettre la dernière touche à un portrait, il le peaufine, ajoute une couleur ici, un détail là, et Madame, plus tout à fait la même, pas tout à fait une autre, révèle un peu plus d’elle-même au moment où elle met en scène sa propre fin.

Car les trois premiers mots du roman ne laissent aucun doute : « Madame est morte ». Elle a choisi de partir « comme elle a vécu toutes ces dernières années, dans son coin et sans un bruit ». Quelques épisodes de sa vie défilent, scènes piquantes telle la remise de la Légion d’Honneur à l’Elysée à un « publicitaire réputé » obsédé de montres Rolex ou sa rencontre avec Calder qui fit d’elle un portrait en fil de fer, scènes pathétiques tel son retour à Auschwitz devenu, tant d’années après, destination touristique vouée à disparaître. Marcher dans Paris, traverser la Seine, chercher encore une émotion dans des galeries d’art et la trouver soudain face à une toile noire zébrée d’éclair, comme si son auteur, Cosme Estève, avait saisi juste l’instant « avant qu’il fît nuit ». Elle y voit une invitation à traverser cette nuit, elle qui « en savait trop et ne voulait surtout pas en savoir davantage ». Alors, elle rentre au Ritz, boit son thé du soir, tire les rideaux, se fait servir un souper au champagne. Elle sait comment traverser le Styx.

Didier Goupil, prix Jean Morer 2016 des Vendanges littéraires, sera à Rivesaltes le 2 octobre pour parler de son roman primé, « Journal d’un caméléon » consacré au peintre Roger Cosme Estève qui apparaît également dans ce court roman. Nul doute qu’il nous éclairera sur les fantômes récurrents qui, d’un livre à l’autre, contribuent à donner à son œuvre un charme singulier.

Bernard Revel

(Lire dans ce blog le texte que nous avons consacré à « Journal d’un caméléon »).

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D
Bonsoir Bernard !<br /> De retour, je découvre cette très belle lecture de Traverser la Seine que je n'avais pas lu...<br /> Merci ! elle est très juste, très fine.<br /> Elle couronne,si j'ose dire, ce we qui nous a ravi, tant humainement que littérairement.<br /> Un grand merci à toute l'équipe et à tous ceux qui ont accompagné ces deux jours.<br /> On reviendra !<br /> Dès l'an prochain...<br /> Amitiés<br /> Didier
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