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Publié par Sylvie Coral

"Tangente vers l'Est" de Maylis de Kerangal.

(Editions Verticales, 128 pages, 12 euros)

De Moscou à Vladivostok, le Transsibérien trace sa ligne d’Ouest en Est, déplaçant aujourd’hui encore une population hétéroclite. Parmi elle, est entassé dans les compartiments de troisième classe un contingent de jeunes garçons appelés pour le service militaire. Ils sont tous pâles et résignés, « l’enfance au fond des cernes », tentant d’oublier ce qui les attend dans la Vodka et la fumée des cigarettes. L’un d’eux, Aliocha, est déterminé à déserter.

Hélène est Française. Elle vient de quitter Anton, son amant Russe. Elle a rejoint la gare la plus proche, Krasnoïarsk, et s’enfuit vers l’Est, malgré « l’absurdité de sa situation et du sens de sa trajectoire quand, montant dans le premier train qui passe, elle ne fait que s’éloigner de sa destination ».

Ces deux-là ne sont pas du même milieu, ne parlent pas la même langue, ne se comprendront qu’avec leurs gestes et leurs regards. Hélène va cacher Aliocha dans son compartiment, d’abord malgré elle, puis décidée à l’aider avec la complicité imprévue d’une provodnitsa.

Bien que ce roman soit dépourvu de dialogues, l’échange humain entre les principaux personnages est d’une incroyable limpidité. Le lecteur devient alternativement Hélène et Aliocha, vibrant comme eux d’angoisse et de soulagement, traqué comme eux par le cruel sergent Letchov.

Emporté par l’écriture fascinante de Maylis de Kerangal, le nez collé à la vitre du train, le lecteur contemple les paysages grandioses, sublimes et inquiétants de la Russie, accompagné par le bruit régulier du Transsibérien qui, indifférent au sort des hommes, poursuit inexorablement sa route. Comme le temps.

Sylvie Coral

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